"[...] beauté, jeu en soi,
jeu que l'homme joue avec son propre symbole, parce que c'est sa seule chance
d'échapper au moins symboliquement
à son angoisse de la solitude,
répétant toujours à nouveau la belle auto-suggestion,
la fuite dans la beauté, le jeu de la fuite;
c'est ainsi qu'à l'homme se dévoile la rigidité du monde embelli, puisque la complète incapacité de croissance, la perfection limitée du monde
qui ne peut devenir éternelle que par la répétition
a besoin toujours de cette fictive perfection;
c'est ainsi qu'à l'homme se dévoile le jeu de l'art, serviteur de beauté,
le désespoir de l'art et son essai désespéré
de créer l'impérissable avec des choses périssables,
avec des mots, des sons, des pierres, des couleurs,
afin que l'espace mis en forme
dure au-delà des âges [...]"
H. Broch, La Mort de Virgile.
(Ilustration : Andy Dixon)